Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
20 mai 2016 5 20 /05 /mai /2016 12:46
« ça va mieux », ou François hollande le bien portant imaginaire

Le temps est venu de mener une autre politique en vue d’un autre mandat, avec un(e) autre président (e), de gauche

La situation de la France est devenue moins catastrophique et il faut s’en réjouir. Toutefois, quelques bons chiffres et quelques gros contrats à l’export ne font pas le printemps économique et social. Cette amélioration reste limitée, la reprise, poussive et ce, pour une bonne et simple raison : le gouvernement persiste dans son erreur et n’a modifié qu’à la marge sa politique d’austérité. Le regain de croissance provient essentiellement de bonnes surprises venues de l’extérieur : la baisse des prix des hydrocarbures et de l’euro. Sans cette manne imprévue, la croissance française n’aurait été, en 2015, que de… 0,5%, soit à peu près le même taux que tous les ans depuis 2012. Une quasi-stagnation à laquelle nous condamne la politique aberrante menée avec constance depuis l’alternance sans alternative : prendre aux ménages pour donner aux entreprises, qui n’en feront pourtant rien tant qu’il n’y aura pas de hausse durable de la demande.

L’effet de ces facteurs va malheureusement s’estomper. Certes, comme dans le reste de l’Europe, la reprise se poursuivra probablement en France, parce qu’un point bas a été atteint, et à la faveur de politiques économiques un peu moins défavorables à la croissance chez nos voisins. Elle n’en restera pas moins laborieuse et très insuffisante au regard du retard accumulé, des besoins et des attentes actuels de notre société. On ne peut pas s’en contenter. Il y a quelque choses de surréaliste à fixer comme objectif une « inflexion de la courbe du chômage », c’est-à-dire la simple interruption d’un mouvement de hausse continue depuis 5 ans, ou à se féliciter d’un taux de croissance de 1,2% ou de 1,5%, alors que c’est la moyenne de l’économie française sur longue période, qu’elle devrait aujourd’hui largement dépasser pour commencer à rattraper son retard après des années de sur-place.

Activité économique, avec des taux de croissance faibles, chômage, avec plus de 600 000 chômeurs supplémentaires en catégorie A depuis 2012, 1,1 million en catégories A, B, et C 1, un niveau de vie par ménage en recul, un taux de pauvreté à peine stabilisé (ayant même augmenté en 2014) s’accompagnant d’une hausse constante du nombre de foyers bénéficiaires du RSA (+ 450 000 entre juin 2012 et décembre 2015 2) etc. : aucun indicateur ne permet de claironner que la France va mieux qu’en début de mandat. On ne peut aujourd’hui parler de redressement, tout au plus d’un début de convalescence, non dénué de risque de rechute.

Au lieu d’affirmer que la France va mieux, il faut dire que la France peut faire mieux, que la France doit faire mieux. Pour cela, la majorité actuelle, si elle veut le rester, n’a pas d’autre solution que de suivre un nouveau cap, après avoir fait un bilan honnête et sans complaisance de 4 années d’errance. Quelques coups de pouce de fin de mandat, en faveur des rémunérations, des embauches ou de l’investissement, aussi bienvenus soient-ils, ne suffisent pas à dessiner les contours d’une autre politique et telle est bien la question posée à la veille de 2017.

1) Après près de 5 années de stagnation, un début d’amélioration qui reste fragile
a) Un certain nombre d’indicateurs semblent devenus favorables.

Au 1er trimestre de 2016, la croissance a atteint 0,5% soit 2% en rythme annualisé. Ce chiffre supérieur à la croissance potentielle de l’économie française (estimée à 1,5% par an), c’est-à-dire à la croissance qu’elle connaît en moyenne à long terme par-delà les fluctuations de la conjoncture, signifierait, si cette tendance se poursuivait, qu’elle commencerait enfin à rattraper l’important retard accumulé pendant la longue période où elle a évolué en-dessous de ce potentiel. C’est le critère retenu pour définir une reprise. Déjà en 2015, le rythme de croissance constaté (1,2%) quoiqu’inférieur à 1,5%, a été le plus dynamique constaté depuis 2011 ; l’économie française semble sortie de sa torpeur (+0,4% par an en moyenne entre 2012 et 2014).

Le niveau de l’emploi, qui augmente à nouveau de manière sensible depuis 2015 (+166 000 postes de travail), progresserait de manière suffisamment rapide en 2016 pour dépasser l’accroissement de la population active, elle-même minorée par la mise en place du plan de 500 000 formations. Le nombre de chômeurs va donc enfin baisser ; c’est la fameuse « inflexion de la courbe du chômage ». Sa diminution au premier trimestre et en particulier au mois de mars (-60 000) peut en être une première étape, même s’il faut souligner qu’elle s’explique principalement par le basculement de chômeurs de la catégorie A vers les catégories B et C, qui regroupent des demandeurs d’emploi ayant exercé une activité réduite (et ne sont donc pas entièrement disponibles). En effet, les effectifs totaux d’inscrits dans les catégories A, B et C n’ont reculé, pour leur part, que de 8 700 en mars.

Par ailleurs, la situation financière des agents économiques s’améliore : le pouvoir d’achat des ménages a progressé (+1,7% en 2015, la plus forte hausse depuis 2007) et le taux de marge des entreprises s’est redressé 3, ce qui devait entretenir le dynamisme de la consommation et de l’investissement. Le redémarrage de ce dernier est traditionnellement considéré comme un signe et un facteur décisifs d’une véritable reprise économique. Pour leur part, les déficits publics ont diminué plus fortement que prévus en 2015 (à 3,5% du PIB au lieu de 3,8% anticipés), alors que depuis de nombreuses années, ils dépassaient régulièrement les objectifs fixés. L’engagement de les ramener en-deçà de 3% en 2017 paraît réalisable.

b) D’emblée, d’importants éléments de fragilité doivent toutefois être soulignés :

Le rebond de ce premier trimestre s’explique en grande partie par un taux de croissance exceptionnel de la consommation (+1,2% sur un trimestre, soit près de 5% en rythme annualisé), dû en bonne partie à un effet de rattrapage. En effet, les attentats du 13 novembre 2015 avaient fortement affecté les comportements d’achat (-0,1% au dernier trimestre de 2015), en particulier les dépenses d’hébergement, de restauration et de transport aérien. On ne saurait en aucun cas espérer le maintien d’un tel dynamisme. Parallèlement, le taux d’utilisation des capacités de production des entreprises reste nettement inférieur à sa moyenne historique, ce qui ne peut que modérer l’ampleur de la reprise de l’investissement.

La conjoncture du secteur de la construction de logements a seulement cessé de se détériorer et son rétablissement ne pourra être que progressif, alors que son effondrement (-25% depuis 2007) a fortement pesé sur l’activité (encore à hauteur de -0,2 à -0,3 points de croissance en 2014 et 2015). Or, son contenu en emploi est élevé. En outre, les besoins apparaissent particulièrement importants dans ce domaine, du fait d’une pénurie d’offre à prix raisonnable et de la transition énergétique à mettre en œuvre (notamment au moyen d’un programme à grande échelle de travaux d’isolement dans l’habitat ancien). Le durcissement des conditions d’octroi du prêt à taux zéro, en 2013, eu un effet « pro-cyclique », c’est-à-dire qu’il a accentué la baisse de l’activité, et la relance de ce dispositif est toute récente. Ce secteur a fortement contribué à l’écart de croissance avec un pays comparable comme le Royaume-Uni, par exemple.

Les anticipations et le moral des entreprises et des ménages demeurent mitigés, les indicateurs en la matière exhibant des signes ambigus. De fait, la conjoncture internationale apparaît à nouveau mal orientée. L’activité dans les économies avancées tend à ralentir, en particulier la reprise américaine s’essouffle, la transition de l’économie chinoise vers un nouveau modèle de croissance se fait difficilement, et plusieurs pays émergents ont plongé dans la récession (Brésil, Russie) - sans oublier un certain nombre d’incertitudes de nature politique (« Brexit », possibilité d’une nouvelle crise grecque, etc.).

c) Une amélioration beaucoup trop faible, trop lente et trop tardive, au regard de la gravité de la situation et de l’ampleur de la reprise chez nos voisins

La croissance de 0,5% au premier trimestre crédibilise la prévision gouvernementale de +1,5% sur l’ensemble de l’année 2016. Néanmoins, le caractère exceptionnel de l’augmentation de la consommation ne permet pas d’espérer faire beaucoup mieux. Or, comme indiqué précédemment, il faudrait que le taux de croissance excède nettement et durablement ce seuil de 1,5% pour que l’on puisse parler véritablement de reprise .

En fait, le redémarrage de l’activité apparaît anormalement faible, beaucoup plus limité que lors des phases antérieures de reprise où il n’était pas rare que la croissance dépasse 3% par an, ce qu’il serait logique de connaître à nouveau dans le contexte d’un tel sous-emploi et d’un tel sous-investissement. Par ailleurs, ce taux de croissance s’avère inférieur à la moyenne de la zone euro, alors que c’était l’inverse auparavant. Entre 2012 et 2008, le PIB a augmenté en France de 0,3% par an en moyenne tandis qu’il a reculé en zone euro de 0,5% ; entre 2012 et 2015, il n’a crû en France que de 0,6% par an contre +0,8% en zone euro, et cet écart entre notre pays et ses principaux partenaires s’accentue aujourd’hui. En 2015, le gouvernement se flatte d’une croissance de 1,2% mais elle a atteint +1,7% dans la zone euro. La France « décroche » et quelque chose ne tourne toujours pas rond dans notre économie. Après sa rechute, en 2012, elle peine toujours à redémarrer - un scénario inédit depuis l’après-guerre.

D’après les projections mêmes du gouvernement (à savoir le programme de stabilité envoyé à la Commission européenne), la reprise qui s’esquisse se révèlera insuffisante pour ramener le PIB français au niveau de son potentiel à l’horizon pourtant encore bien éloigné de 2020,. Elle ne suffira pas à faire refluer le chômage, qui ne commencera à reculer significativement que lorsque la croissance dépassera ce seuil de 1,5%. En l’état actuel des choses, les effectifs totaux de demandeurs d’emploi se replieraient en 2016 essentiellement du fait des plans temporaires de formation et de soutien à l’emploi. Les effets de ceux-ci épuisés, ils cesseraient de diminuer dès 2017.

Au final, le bilan en matière d’emploi est terrible. Le nombre de chômeurs inscrits à Pôle Emploi reste supérieur de 1,3 millions au niveau de 2008, et de plus de 600 000 à celui qui avait été atteint au moment de l’alternance, alors que sur la même période il s’est réduit chez la plupart de nos voisins. Des secteurs entiers restent sinistrés. Depuis 2008, 500 000 emplois ont été détruits dans l’industrie et 200 000 dans la construction.

En 2012, le Président de la République avait annoncé « l’inversion de la courbe du chômage » pour la fin de 2013. « C’est un engagement que j’ai pris. Ce n’est pas une parole en l’air » réaffirmait-il en mai 2013. En vérité, le nombre d’inscrits à Pôle Emploi n’a même pas été stabilisé au cours de cette année 2013 et a encore augmenté, entre décembre 2013 et aujourd’hui, de près de 230 000 personnes, en catégorie A, et de près de 560 000 en catégories A, B et C.

2) Une amélioration entièrement due à de « bonnes surprises » venues de l’extérieur, compensant temporairement les erreurs de la politique économique et sociale du gouvernement

Le redémarrage progressif de l’activité depuis 2014 est entièrement dû à des facteurs extérieurs, en premier lieu, à la baisse de près des deux-tiers des prix du pétrole entre la mi-2014 et le début de 2016, représentant pour l’économie française l’équivalent d’un plan de relance d’1% du PIB (23 Md€ en 2015), ainsi qu’à la dépréciation de l’euro vis-à-vis du dollar, d’environ 20%. En 2015, on peut attribuer 0,5 point de croissance française à la première et 0,2 point à la seconde. Sans ces coups de pouce imprévus, la croissance française n’aurait donc été que de…0,5% - soit presque exactement le même taux observé depuis 2012. Encore ne comptabilise-t-on pas ici les conséquences favorables de la fin de l’austérité budgétaire et le redémarrage vigoureux de l’économie chez certains de nos voisins et principaux partenaires commerciaux (Espagne, Royaume-Uni).

En vérité, l’évolution de la conjoncture française confirme pleinement le rôle moteur de la demande dans un situation de sous-emploi dans laquelle notre économie est enlisée. Ce sont les gains de pouvoir d’achat des ménages, permis par le recul des prix des matières premières (et dans certains pays par une politique budgétaire devenue plus expansionniste) qui expliquent à eux seuls le dynamisme un peu retrouvé de l’activité. On n’a pu observer nulle part, même en Allemagne, de reprise principalement tirée dès le départ par l’investissement, grâce à une restauration de la profitabilité, ou par un enrichissement de la croissance en emplois, grâce à une baisse du « coût du travail ».

Fondée sur la croyance naïve que tout procède des entreprises et sur le faux bon sens d’un « il faut produire avant de redistribuer », cette politique d’«offre» a tout misé sur la baisse du coût du travail et le rétablissement des marges des entreprises, pour améliorer la compétitivité-prix et les incitations à investir. Elle a fait obstinément fi du fait que les chefs d’entreprise n’ont cessé de déclarer que leur production était avant tout contrainte par l’insuffisance de la demande et de leur carnet de commande.

Conjuguée avec l’impératif de réduction des déficits publics à marche forcée, cette option a conduit à la stratégie proprement suicidaire consistant à ponctionner les ménages et à sabrer dans les dépenses publiques, en plein creux conjoncturel, pour redresser en même temps les comptes publics et le taux de marge des entreprises.

La stabilisation (ou la légère baisse) du taux de prélèvement obligatoire depuis 2014 masque, en effet, deux mouvements de sens inverse : une baisse pour entreprises et une hausse pour les ménages, tandis que la croissance des dépenses publiques, quasiment réduite à 0, s’avère la plus faible depuis qu’on peut les retracer (contre +2,5% par an en volume avant 2008, par exemple). Au final, selon l’OFCE, l’ensemble des mesures prises depuis 2010, se sont traduites par 66 Md€ de prélèvements supplémentaires sur les ménages, qui subissent désormais un taux de prélèvement record en part de PIB (28,2%), et de seulement 8 Md€ sur les entreprises, dont le taux de prélèvement en part de PIB (16,4%) est redevenu inférieur à ce qu’il était avant la crise - sans aucun effet positif visible sur l’économie.

Au contraire, cette stratégie a eu des effets délétères sur la croissance. Pesant sur la demande et les recettes fiscales, ils ont d’ailleurs aussi limité l’amélioration des comptes publics. Si les marges des entreprises ont tout de même bénéficié du CICE puis du Pacte de responsabilité 4, les entreprises, faute de débouchés, n’en ont pas profité pour embaucher ou investir davantage. D’un côté, le sacrifice des dépenses publiques, en particulier de l’investissement public (-10% !) à la suite de la réduction drastique des dotations aux collectivités locales, ont eu des conséquences négatives très marquées sur l’activité 5. Cette orientation explique en partie, par exemple, que la reprise ait été plus dynamique au Royaume-Uni car, contrairement à certaines idées reçues, la politique budgétaire y a été moins restrictive en matière d’investissement. De l’autre, cet effort a financé des transferts aux entreprises qui n’ont servi qu’à gonfler inutilement leurs marges, ce qui s’est traduit par augmentation des dividendes distribués à leurs actionnaires ou des actions gratuites généreusement attribuées à leurs PDG.

Cet enchaînement fatal aurait pu durer longtemps sans la baisse des prix de pétrole, qui a apporté un soutien bienvenu au pouvoir d’achat et à la consommation (tout en contribuant d’ailleurs aussi à la hausse des marges des entreprises). Pour sa part, la dépréciation de l’euro renforçait, elle, la compétitivité des entreprises françaises, qui ont enfin regagné quelques parts de marché, et améliorait la situation financière du secteur exportateur, bien mieux que des baisses de prélèvements du CICE et du pacte de responsabilité, qui bénéficient indifféremment à toute l’économie, y compris à la grande distribution, aux professions réglementées, etc.

Par contraste, on attend toujours que le redressement des marges se transforme en investissement et en embauches, comme on attend toujours la vérification du fameux théorème qui justifie cette stratégie - « les profits font les investissements de demain et les emplois d’après-demain » - dû à l’ancien chancelier H. Schmidt, mort nonagénaire sans en avoir jamais vu la confirmation lui-même. En particulier, les effets de la baisse du coût du travail sur l’emploi demeurent un pur postulat et les estimations ou les prévisions parfois fournies à cet égard - ne nous y trompons pas - reposent sur l’usage de modèles économétriques d’essence libérale, qui font l’hypothèse de ces effets, mais n’en apportent aucunement la démonstration. En revanche, les gains de pouvoir d’achat ont eu des effets immédiats sur la consommation et la croissance. Keynes l’emporte sur l’ordo-libéralisme allemand.

Il reste que ces facteurs extérieurs sont momentanés. On peut encore espérer des effets différés de la baisse des prix du pétrole dans la mesure où le taux d’épargne des ménages a crû. Ceci veut dire qu’ils n’ont encore dépensé qu’une partie de la hausse de leur pouvoir d’achat. Cependant, les prix des matières premières se stabilisant, ils finiront par se dissiper, en 2017, si une autre politique économique ne prend pas le relais pour tirer la croissance.

3) Des coups de pouce de fin de mandat ne feront jamais une politique de gauche

Le dégel du point de la fonction publique (au bout de 6 années), la création d’un prime pour les professeurs des écoles, permettant une remise à niveau avec leur collègues de l’enseignement secondaire, le plan d’urgence pour l’emploi, comprenant une aide forfaitaire à l’embauche d’un nouveau salarié par une PME (en-deçà d’un certain niveau de rémunération) et la mise en place de 500 000 formations pour les chômeurs, ou encore la prolongation du dispositif de suramortissement destiné à stimuler l’investissement, constituent des mesures qui peuvent, chacune d’entre elles, avoir des justifications. Elles semblent trancher quelque peu avec une idéologie et un discours bêtement hostiles à la dépense publique.

Toutefois, elles viennent très tard, suscitant des suspicions légitimes de manœuvre électoraliste, d’autant qu’elles ne forment pas un tout cohérent donnant corps à un changement de stratégie, à savoir un véritable plan de relance. Les dépenses qui viennent d’être décidées ne remettent d’ailleurs pas cause en principe le programme d’économies nettes de 50 Md€ sur la période 2015-2017, et donneront donc lieu à des annulations de crédits sur d’autres postes.

De son côté, la nouvelle manipulation de l’impôt sur le revenu, comme tous les ans désormais, a tout d’un cadeau fiscal à courte vue et ne ressemble en rien à une réforme digne de ce nom, qui ne saurait commencer par affaiblir l’impôt progressif et citoyen. Une telle réforme devrait, au contraire, le renforcer, en particulier au moyen d’une fusion avec la CSG, qui permettrait, elle, de réduire le prélèvement pesant sur la moitié des foyers les plus modestes, de toute façon non-imposables à l’IR. Par ailleurs, cette baisse, même ajoutée aux précédentes, ne compense guère l’alourdissement de la masse des prélèvements anti-redistributifs à la charge des particuliers,: la hausse des cotisations de retraite, des impôts locaux (puisque les collectivités territoriales ont souvent été obligées de compenser la baisse des dotations de l’Etat), de la TVA (au 1er janvier 2014) et de différentes taxes écologiques destinées notamment à financer le CICE, de la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétique), ou encore de la CSPE (contribution au service public de l’électricité).

Enfin, le gouvernement ne revient pas sur les aberrantes baisses de prélèvements réservées aux entreprises, souvent les plus riches et les plus prospères. La réduction de la contribution sociale de solidarité des sociétés coûtera à nouveau 1Md€ en 2016 et sa suppression totale, 3 Md€ en 2017, principalement au bénéfice des enseignes de la grande distribution, des banques et des grandes entreprises de réseau. Il faut absolument annuler ce projet, qui constitue - il faut le dire - un des plus grands scandales financiers de la Vème République, bien pire que celui des « avions renifleurs » ou du « trou des Halles ». L’élargissement de la baisse des cotisations sociales employeurs, toujours dans le cadre du Pacte de responsabilité, va entraîner un surcoût de plus de 3,5 Md€ au budget de l’Etat en 2016, et la fin de la contribution exceptionnelle au titre de l’impôt sur les sociétés, 2,5 Md€, par définition au profit des entreprises qui ont le moins besoin d’être aidées. Il convient de redéployer les moyens mis au service de ces dispositions injustes et totalement inefficaces en faveur d’un plan de soutien à l’activité, alors que la conjoncture mondiale et nationale est plus incertaine que jamais, et la reprise en tout état de cause beaucoup trop lente. Un plan de relance global et cohérent, tourné vers les besoins sociaux les plus criants 6 et la préparation de l’avenir (transition énergétique, recherche et nouvelles technologies) ne pourra être sérieusement accusé d’électoralisme.

*************

Le chômage de masse appelle un soutien intensif à l’activité. On ne peut ne pas se contenter de coups de pouce, aussi bienvenus soient-ils, et encore moins miser sur des baisses de cotisations, d’impôt sur le revenu ou sur le démantèlement progressif du code du travail, baptisés « réformes structurelles », comme si ledit chômage de masse avait pour origine des salaires trop élevés ou un quelconque manque de flexibilité de l’emploi. L’erreur de diagnostic qui remonte à 2012 peut encore être corrigée avant 2017, mais il reste très peu de temps. La politique de relance que l’Allemagne s’est mise à mener, en pratique, en raison d’un afflux de réfugiés, la France doit la mettre en oeuvre pour ses chômeurs et ses salariés.

Daniel Vasseur

1- La hausse, moins élevée, dans les statistiques de l’INSEE (nombre de chômeurs au sens du BIT) apparaît tributaire d’un changement méthodologique (modification de la question posée aux individus de l’échantillon).

2- Et + 236 000, s’agissant des bénéficiaires du seul « RSA socle » , qui ne perçoivent par ailleurs aucun revenu d’activité.

3- Le nombre de défaillances d’entreprises se mettant aussi à reculer.

4- D’où une hausse du taux de marge des sociétés non-financières, de 29,2% en 2014 à 31,4% en 2015.

5- En particulier en période basse conjoncture durant laquelle l’effet « multiplicateur » de ces dépenses publiques est plus important.

6- Une mention spéciale doit être faite à la récente « prime d’activité », puisqu’il s’agit d’une mesure d’ampleur, remédiant aux insuffisances avérées d’un dispositif précédent (la RSA activité), notamment du fait de sa trimestrialisation et de sa simplicité. Ces qualités ont pour contrepartie un coût budgétaire, qu’il convient d’assumer comme ce devrait être le cas d’autres réformes répondant à un besoin réel.

#çavamieux ?
Partager cet article
Repost0

commentaires

Ç
Il est vrai que les odeurs en provenance du gouvernement commencent à fouetter un peu quand même....c'est pourquoi il ne faut pas hésiter à aérer le plus possible dans les bureaux des ministères (notamment du travail....)surtout avec la chaleur de l’été qui arrive…. !Bonne continuation !
Répondre