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17 décembre 2009 4 17 /12 /décembre /2009 12:05

Le changement oui, la régression non ! Dans le projet de réforme du lycée, le gouvernement a choisi de rendre optionnel en terminale l’enseignement de l’Histoire Géographie pour les filières scientifiques. Cette décision confirme, s’il en était besoin, que le débat sur l’identité nationale ne correspond à aucune volonté sincère d’approfondir les principes et les valeurs de notre république, mais qu’il se réduit à une cynique manipulation politique, dont le seul objectif est la mobilisation des pires instincts d’une société en crise. Dans une période trouble, où les faits historiques sont régulièrement remis en cause par les obscurantismes de tous bords, où la compréhension du monde contemporain est plus complexe que jamais, la droite s’apprête à priver la moitié des bacheliers généraux d’enseignements indispensables pour l’appréhension de notre histoire collective.

A travers ce débat, s’opposent en réalité des conceptions différentes de l’éducation, que les positions des uns des autres sur la réforme du lycée ne recoupent d’ailleurs pas. Certains de nos amis, parmi les syndicats d’enseignants notamment, soutiennent cette initiative. La crise qui frappe l’école est si grave que tout mouvement serait bon à prendre. Nous disons que des réformes profondes sont nécessaires, mais que le sens qui leur est donné est primordial. Il ne faudrait certes pas qu’au nom du nécessaire maintien des enseignements d’histoire géographie en terminale S, nous sombrions dans un béat soutien aux conservatismes et aux corporatismes disciplinaires. Précisions ainsi la raison de notre opposition : c’est le refus de la suppression d’apprentissages aidant à l’acquisition d’une culture générale et d’outils de compréhension indispensables aux citoyens de demain. L’enseignement de l’histoire-géographie, aussi perfectible soit-il tant dans son contenu que dans sa démarche pédagogique, en fait partie.

Au-delà de quelques aménagements horaires, la réelle question posée est celle de la finalité de l’école et des missions du service public d’éducation. L’école doit permettre la construction de l’esprit critique, du raisonnement, de la citoyenneté éclairée. Nous devons définir ce que l’école doit apporter comme culture commune à l’ensemble des jeunes générations : savoir-faire, savoir être, connaissances nécessaires dans la société du xxie siècle. Donner les outils aux jeunes pour préparer leur vie citoyenne et leur orientation professionnelle nécessite de mettre l’accent sur l’acquisition de compétences générales d’expression et de communication, de raisonnement, de recherche. Si nous voulons accompagner chaque jeune dans son autonomie et son émancipation, la capacité de structuration des informations et de construction d’un regard critique est indispensable dans une société où les sources d’informations et d’éducation sont multiples et complexes.

Détourné de ses ambitions initiales en le limitant à une juxtaposition de connaissances disciplinaires minimales, le socle commun des connaissances et des compétences doit être remis en chantier. Une partie non négligeable de l’échec scolaire de notre système éducatif est due à une incapacité de transformation de l’école et d’adaptation à des publics nouveaux, socialement et culturellement hétérogènes. Au nom de l’accès de tous à l’excellence disciplinaire dès le collège, on a en réalité manqué la démocratisation de la réussite scolaire. Un débat profond doit s’engager sur les contenus, les objectifs des programmes, ainsi que sur les modalités de leur acquisition par les élèves. Seule une profonde remise en question des structures disciplinaires et pédagogiques actuelles permettra une réelle amélioration.

Ce défi doit être celui de la gauche. L’éducation, subissant de plein fouet les politiques de la droite, traverse une crise majeure. Le gouvernement s’est attaqué à l’école dans un double mouvement budgétaire et idéologique. Parce que nous croyons dans les fondements de l’école gratuite, laïque, ouverte à tous, il est urgent de redonner de l’espoir à l’école, à ses élèves, à leurs familles, aux enseignants, aux acteurs du monde éducatif. Cela ne pourra voir le jour sans ruptures tant la société a évolué au cours de ces quarante dernières années sans que le système ait été remis en chantier dans ses profondeurs et tant les aspirations des jeunes et des familles ont changé. Notre système éducatif est aujourd’hui dépassé et force est de constater qu’il est devenu injuste : il sacrifie les élèves en difficulté à défaut de leur donner les moyens de réussir. Si la gauche et le Parti socialiste ont pu eux-mêmes par le passé manquer d’audace, il nous faut aujourd’hui cesser de retoucher à la marge, d’ajuster, de compléter sans rien changer en profondeur d’un système éducatif désuet.

Bruno Julliard

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