Vite la loi encadrant les licenciements économiques et interdisant les licenciements boursiers ! Attendre serait une grave erreur.
C’est un engagement de François Hollande :
«Pour dissuader les licenciements boursiers, nous renchérirons le coût des licenciements collectifs pour les entreprises qui versent des dividendes ou rachètent leurs actions, et nous donnerons aux ouvriers et aux employés qui en sont victimes la possibilité de saisir le tribunal de grande instance dans les cas manifestement contraires à l’intérêt de l’entreprise.» (Engagement 35)
Cet engagement devait être programmé entre août 2012 et juin 2013 à lire le calendrier du changement. Dans le chapitre «S’appuyer sur les partenaires sociaux et la société civile pour retrouver le chemin de la croissance durable et de l’emploi», au point 1, l’encadrement des licenciements boursiers fait partie des grands chantiers de la conférence nationale pour la croissance et l’emploi.
Or force est de constater que le sujet n’est pas traité dans l’accord national interprofessionnel signé le 11 janvier 2013 par le Medef et trois organisations syndicales.
Qu’attend le gouvernement ?
Depuis l’arrivée de la gauche au pouvoir, et souvent parce qu’elles avaient été mises sous le coude avant les présidentielles, les fermetures d’entreprises se multiplient en particulier dans l’industrie. Dans bien des cas, la crise a bon dos et sert de prétexte à fermer des usines souvent rentables mais insuffisamment aux yeux des actionnaires. Ce qui se passe, en fait, -et c’est fréquent en cas de crise-, est une nouvelle salve de délocalisations qui engage une nouvelle répartition internationale de la production en jouant à fond la carte du dumping social et fiscal.
Face à ce danger, la France doit avoir une stratégie défensive efficace permettant d’empêcher la disparition de pans entiers de son industrie. Quand une usine ferme, on perd des savoirs faire et il est extrêmement difficile de la rouvrir. Oui, il faut défendre bec et ongles ces industries pour réussir le redressement économique du pays, pour engager les mutations quand elles sont nécessaires et moderniser les capacités productives de la France.
Bien sûr ce n’est pas la seule méthode pour l’urgente ré-industrialisation. Une stratégie offensive doit se mettre en place grâce à des bonds considérables en faveur de la recherche, de l’innovation. Il faut aussi organiser toutes nos filières en engageant les révolutions technologiques et la transition énergétique.
Mais les deux stratégies sont indispensables… et laisser se poursuivre des licenciements boursiers est une erreur majeure dont les conséquences sont extrêmement graves.
Rien ne justifie un silence qui devient pesant quant au calendrier de la mise en œuvre de cet engagement.
Sur le fond, le Sénat avait examiné, il y a un an, une proposition de loi qui avait été votée par les groupes communistes, socialistes et écologistes. C’est une bonne base législative.
Avec le courant « Maintenant la Gauche » nous avons tiré la sonnette d’alarme dès le mois de juillet 2012 et en avons fait une des propositions prioritaires de la motion 3 au congrès du PS. A la tribune de Toulouse, j’ai exhorté le gouvernement à stopper l’hémorragie industrielle et d’emplois et j’ai demandé le vote immédiat de cette loi.
Aujourd’hui de très nombreux salariés touchés de plein fouet par ces plans de licenciements, dont certains sont prétendument économiques, manifestent et demandent au gouvernement d’agir et de faire voter la loi promise.
Par ailleurs, de nombreux députés socialistes concernés localement manifestent la même impatience, plus discrètement.
Lors du colloque du 12 décembre 2012 sur la compétitivité et l’emploi organisé par le club Gauche avenir, les intervenants, issus des forces de toute la gauche dont des écologistes mais aussi des économistes, ont appelé unitairement l’examen rapide d’une loi contre les licenciements boursiers.
Ce mardi, au Bureau national, Emmanuel Maurel, qui intervenait en notre nom, a réitéré avec insistance nos propositions et demandé à Jean-Marc Ayrault de déposer immédiatement cette loi tant attendue. Il n’a obtenu aucune réponse. Silence …. Ce silence ne peut durer. Le gouvernement doit passer à l’acte.
Marie-Noëlle Lienemann