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Mais cette équipe hétéroclite va devoir gérer la minorité, pour ne pas dire l'opposition, puissante et revancharde des partisans de Ségolène Royal. La "guerre des deux roses" n'est pas une nouveauté : les affrontements passés entre François Mitterrand et Michel Rocard, puis entre Lionel Jospin et Laurent Fabius n'étaient pas moins rugueux. Ils avaient fini, à chaque fois, par trouver un vainqueur incontesté. Nous n'en sommes pas là, à l'évidence.
Quant aux idées et aux alliances, le moins qu'on puisse dire est qu'elles ne traduisent pas - encore ? - une rénovation en profondeur que bon nombre de socialistes jugent pourtant indispensable. Le "socialisme de gouvernement clairement ancré à gauche", selon la définition de Mme Aubry, comme la gauche plurielle "rose, rouge et verte" qu'elle appelle de ses voeux fleurent bon les années 1990.
Deux tests décisifs attendent Martine Aubry : d'une part, les élections européennes de juin 2009, où elle devra trouver une synthèse improbable entre pro- et antieuropéens de sa majorité ; d'autre part, les élections régionales du printemps 2010, où se reposera concrètement la question des alliances, y compris avec le Modem de François Bayrou. D'ici là, gageons que la guerre des roses continuera de faire rage. Pour le pire, ou le meilleur.

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Dans une nouvelle tentative pour se faire entendre - mais en l'absence de Mme Royal comme de celle du premier secrétaire sortant, François Hollande -, les soutiens de l'ex-candidate (Julien Dray, Pascal Terrasse, François Rebsamen et David Assouline) se sont succédé à la tribune pour dénoncer "l'ostracisme" dont ils s'estiment victimes. Leurs 5 amendements au texte d'orientation ont été rejetés. Ils portaient sur des thèmes qui leur sont chers, sur lesquels ils comptent bien continuer à marquer leur différence avec la nouvelle direction socialiste : la politique européenne, l'instauration d'une cotisation "modique" pour adhérer au PS, ou encore l'organisation de "primaires de toute la gauche" pour la désignation du futur candidat à l'élection présidentielle.
"NOUVEAUX" ET VIEUX ROUTIERS
Mme Aubry avait promis une direction féminisée, rajeunie et renouvelée. Sur ces 3 points, elle a tenu ses engagements. Le nouveau secrétariat national est paritaire : 19 hommes, 19 femmes ; 60 de ses membres font leur entrée à la direction du parti ; 40% ont moins de 40 ans. En revanche, la nouvelle direction est moins "resserrée" qu'attendu (38 membres au lieu de 45 pour l'équipe sortante). Parmi les nombreux "nouveaux" figurent l'ex-président de l'UNEF, Bruno Julliard (éducation), la députée strauss-kahnienne de Paris Sandrine Mazetier (immigration) ou Bertrand Monthubert, président de l'association "Sauvons la recherche" (enseignement supérieur et recherche). Toutefois, le premier cercle de la nouvelle direction est solidement charpenté par des hommes-clés, pour la plupart des vieux routiers appartenant aux courants qui ont soutenu Mme Aubry, comme Claude Bartolone, Christophe Borgel ou Harlem Désir. Ce dernier, député européen et principal lieutenant de Bertrand Delanoë, fait partie du carré de tête de l'organigramme. On y trouve aussi François Lamy, nommé "conseiller politique auprès de la première secrétaire", Arnaud Montebourg, chargé de la "rénovation", et, enfin, Benoît Hamon, dont la motion représentant la gauche du PS avait remporté 18,5 à Reims.
Outre 9 postes pour ses proches, M. Hamon obtient la fonction convoitée de porte-parole. Il est passé aux travaux pratiques dès dimanche matin, sur France Info, en demandant "le rétablissement d'une forme d'autorisation administrative de licenciement pour les licenciements boursiers".
Autre poste stratégique, celui des "élections et de la vie des fédérations" est confié au strauss-kahnien Christophe Borgel, tandis que le député de Seine-Saint-Denis et bras droit de Laurent Fabius, Claude Bartolone, récupère les "relations extérieures". La création d'un "laboratoire des idées", sorte de méga- "think-tank" socialiste, est confiée à l'ancien ministre Christian Paul, proche de M. Montebourg, et le "Forum des territoires" à l'ancienne garde des sceaux Marylise Lebranchu. Soucieuse d'apaiser les tensions, Mme Aubry a assuré "à Ségolène Royal" que la porte "resterait ouverte" pour elle et ses proches "pendant les trois années" de son mandat de première secrétaire. "Faux départ" et "mascarade", a répliqué Vincent Peillon, tandis que l'ex-candidate a réaffirmé, dimanche soir sur France 2, qu'elle souhaitait se "mettre à la disposition du parti".